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La dernière marche du Président

par Akodien 6 Juin 2007, 14:57 Nouvelles du jour

Akodians-386.jpgLe président de l’Alliance APJ/Jëf-Jël, Talla Sylla quitte la scène politique. Dans un communiqué parvenu hier, mardi 5 juin à notre rédaction, le leader de la « Jeunesse malsaine » affirme se retirer de la vie politique, estimant qu’il n’a plus la force de continuer, parce que « malade et épuisé »..
« Aujourd’hui, je suis malade, épuisé et, je ne me sens plus la force de continuer. J’ai donc décidé de me retirer de la vie politique publique » a écrit hier, Talla Sylla, le président de l’Alliance Jëf-Jël, formation politique née 1998, dans une adresse aux Sénégalais dont copie a été faxée à notre rédaction hier. Si le jeune dirigeant politique, il a 41 ans, y déclare que son « amour pour le Sénégal reste intact » au point qu’il n’exclut pas de revenir. « Un jour, peut-être, s’il plaît à Dieu, je reviendrai », indique-t-il. Mais pour l’heure, « malade et épuisé », il décide conscient certainement de ses limites physiques et morales, de saluer le public politique et de se retirer dans ses quartiers privés, le temps de se ressourcer. Car le leader du Jëf Jël rappelle dans son texte son « engagement sans retenue sur tous les terrains » et « tous les combats au service du Sénégal et des Sénégalais » qu’il a mené et compte mener si Dieu lui donne la force et la flamme nécessaire. Talla Sylla a souligné à ce propos comme pour prendre l’histoire en témoin, qu’il a poursuivi son combat après avoir été « victime d’une cruelle et lâche agression physique » en octobre 2003.

Celui qui, à 41 ans seulement, a décidé, sans crier gare, à être un « retraité politique », momentané ?, était pourtant jusqu’à cette date, présent sur la scène politique sénégalaise depuis plus de 20 ans. Si à la présidentielle de mars 2000, son « mouvement » est né en 1998, Talla Sylla avait décidé de se présenter contre Abdou Diouf. Mais, âgé de moins de 35 ans, il ne pouvait franchir l’écueil constitutionnel que constituait la limite d’âge des candidats, définie par le code électoral. Avait finalement décidé de soutenir Moustapha Niasse, Secrétaire de l’Alliance des forces de progrès (AFP), qui arrive en troisième position derrière Diouf et de Me Abdoulaye Wade. En 2007, ayant eu l’âge constitutionnel requis, il s’est lancé malgré sa maladie, à la conquête de la magistrature suprême pour la première fois sous la bannière de sa propre formation.

Un parcours politique mouvementé
L’homme a la politique dans le sang. Le jeune dirigeant du mouvement étudiant qui se définit comme le leader de la « jeunesse malsaine », cette jeunesse que l’ancien président socialiste sénégalais Abdou Diouf avait vivement pris à partie en 1988, houspillé qu’il était pendant la campagne électorale surtout à Thiès, a créé dès 1992, le mouvement Jeunesse pour l’alternance (JPA, proche du PDs) en 1992. « Député de la rue », disait-il, il devient aux élections législatives d’avril 2001, « député du peuple », occupant en l’occasion, la fonction de vice-président de l’Assemblée nationale en étant membre du groupe parlementaire de l’Afp. Comme son mentor, Me Abdoulaye Wade avec qui, il divorce très rapidement, il est un personnage imprévisible, au langage souvent châtié. Le verbe facile, il aime haranguer. A l’âge de 14 ans, il militait déjà au sein du Parti africain de l’indépendance (PAI de Mahjmouth Diop rappelé à Dieu le 27 janvier dernier). Le PAI est le creuset de la Gauche sénégalaise. Plusieurs formations politiques actuelles de cette gauche dite historique sont issues de ses flancs. La Ligue démocratique / Mouvement pour le parti du travail (LD/ MPT), d’Abdoulaye Bathily, Le Parti pour l’indépendance du travail (PIT), d’Amath Dansokho pour ne citer que ceux-là.

En octobre 1987, Talla Sylla est élu par ses collègues président de la Coordination des étudiants de Dakar (CED) où on trouve un certain Mouhamadou Bodj et celui qui est devenu un confrère, Assane Saada. Un « syndicat » étudiant extrêmement bruyant pendant cette période, l’une des plus critiques pour le régime de Diouf. En février 1988, il dirige le mouvement de grève à l’université contre « les fraudes électorales opérées lors de la présidentielle par le président Diouf ». Une grève qui va faire vaciller le régime et aboutir à l’arrestation d’Abdoulaye Wade, alors candidat du Parti démocratique sénégalais (Pds). Talla Sylla est accusé par le pouvoir socialiste d’être manipulé par le leader libéral. Pour montrer son indépendance vis-à-vis des politiques, il se signale, toujours à la tête du CED, par un soutien à la grève lancée en 1989 par le Syndicat autonome des enseignants du supérieur (SAES). En 1990, après une nouvelle grève à l’université, Talla Sylla est exclu de l’UCAD. Il obtient néanmoins une bourse d’étude en France de la part du gouvernement à la suite de l’intervention du président de l’Assemblée nationale d’alors, Abdou Aziz Ndaw, originaire comme lui de la région de Thiès.

Le gouvernement de Diouf d’alors a-t-il fait circuler des rumeurs sur cette bourse pour faire passer le jeune dirigeant comme un vendu ? On peut le penser. Toujours est-il qu’il essuya quelques critiques dans ce sens. Sans se soucier de ces accusations malveillantes, inscrit en 1991 à l’Université de Grenoble, il crée à la veille de la présidentielle et des législatives de 1993, un mouvement, Jeunesse pour l’alternance (JPA). Un mouvement dont l’objectif est de mettre fin au régime du président Diouf en soutenant Me Abdoulaye Wade, qu’il considère comme « le principal pôle de l’alternance » au Sénégal. En 2000, l’histoire lui donna raison.

Abandonnant ses études en raison de ses multiples activités politiques, Talla Sylla voit sa bourse d’études suspendue. Fin 1995, il rentre au bercail. En profite pour transformer la JPA en un parti politique, dénommé Alliance pour le progrès et la justice (APJ/ Jëf-Jël) en 1998, précisera Moussa Tine, son camarade, qui deviendra, quelques années plus tard, Alliance Jëf-Jël. Après les élections municipales de 1996, il rompt avec le leader du Pds à la suite de divergences politiques avec l’ancien numéro deux d’alors de ce parti, Idrissa Seck. Aux élections législatives de mai 1998, l’Alliance Jëf-Jël fait partie de la liste nationale conduite par Djibo Leyti Kâ, leader du mouvement Renouveau, après sa démission du Parti socialiste.

En juillet 1998, nouvelle rupture. Talla Sylla dénonce Djibo Leyti Kâ qui a décidé de transformer le Renouveau en parti politique, l’Union pour le renouveau démocratique (URD). Le Renouveau démocratique, pour Talla Sylla, ne devait n’était qu’un creuset pour toutes les forces démocratiques en lutte contre le Ps. Quelques mois après, il est arrêté et mis en prison pour offense au chef de l’Etat, les Sénégalais découvrent un homme fortement marqué par la foi. Talibé mouride, il se veut fervent. Il déclare que sa « source d’inspiration, ce sont les khassaides (poèmes) de Cheikh Ahmadou Bamba ». Aux élections législatives d’avril 2001, Talla Sylla se présente, sur la liste nationale, sous la bannière de Jëf-Jël. Unique député de son parti, il rejoint le groupe parlementaire de « L’Espoir », de l’Afp que préside Madieyna Diouf, coordonnateur national de la formation, deuxième parti au Parlement, derrière le Pds avec onze députés.

Il démissionne de l’Assemblée nationale le 8 décembre de la même année de son mandat de député, estimant qu’il avait « été privé de s’exprimer en tant que parlementaire ». « On m’a empêché de m’exprimer lors du débat sur l’affaire des 6 milliards et lors du vote du budget 2002 des pouvoirs publics », clame-t-il. L’affaire dite des »6 milliards de la SONACOS », avait été soulevée par le leader de l’Afp, Moustapha Niasse. Il concernait le retrait de 6 milliards de FCFA des caisses de la Société nationale de commercialisation des oléagineux (société publique) vers le Trésor public. « On n’a pas voulu que je demande des explications sur le budget de fonctionnement de la Présidence et les 379 millions (environ 570.000 euros) prévus pour les dépenses de fêtes et de cérémonies", avait ajouté Talla Sylla. Son camarade Moussa Tine, avait pris le relais, au point qu’il s’est trouvé certains pour déclarer que c’était là « une combine » du Jëf-Jël, pour se passer le témoin à l’hémicycle. Il n’en est rien, car Moussa Tine, le remplaçant est resté jusqu’à la fin du mandat. On apprenait hier, que la direction du parti n’avait été informée que le même jour de la décision de son président, lui qui est le principal bailleur de la formation.
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