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Cynique « black business » entre les Etats-Unis et l’Afrique

par Akodien 9 Août 2007, 11:06 Lu pour vous

Obasanjo.jpgDans la bataille commerciale qui, en Afrique, l’oppose à la Chine et aux anciennes puissances coloniales, Washington reçoit un soutien inattendu. Fondé par M. Andrew Young, ancien maire d’Atlanta et proche de Martin Luther King, le cabinet Goodworks International favorise les liens économiques entre les Etats-Unis et le continent noir, notamment le Nigeria. M. Young n’hésite pas, à cette fin, à utiliser ses « racines africaines » et à s’allier avec des compagnies douteuses.
Par JEAN-CHRISTOPHE SERVANT
http://www.monde-diplomatique.fr/2007/06/SERVANT/14809
JUIN 2007 -  Pages 20 et 21  Journaliste.

Une belle cérémonie d’adieu. Le 19 décembre 2006, M. Olusegun Obasanjo, président sortant du Nigeria, était l’invité d’honneur d’un dîner organisé dans la grande salle du Waldorf-Astoria à New York. Après deux mandats passés à la tête du géant de l’Afrique de l’Ouest, l’ancien général converti à la « democrazy (1)  » y retrouvait quelques très chers amis. Parmi eux, les trois principaux investisseurs dans les hydrocarbures du pays – Chevron, ExxonMobil et Shell Nigeria –, sponsors de cette nuit de « célébration et d’hommage » à laquelle participaient huit cent cinquante personnalités. M. Obasanjo s’apprêtait à quitter le pouvoir après l’élection présidentielle du 21 avril 2007 (2).
Entre poulet fermier et gâteau au chocolat, Mme Hope Masters, fille de feu Leon H. Sullivan, célèbre militant noir américain des années 1960, exprima son désir de voir le président nigérian récompensé par un prix Nobel de la paix. La fondation Sullivan est à l’origine des plus importants sommets organisés sur le continent noir entre entrepreneurs privés afro-américains et africains. Absent de la soirée, l’ex-secrétaire d’Etat américain Colin Powell n’en envoya pas moins un message d’amitié à M. Obasanjo.
Des marques de reconnaissance dûment justifiées : le président du Nigeria a su attirer les investisseurs dans son pays, au prix d’une multiplication des banques privées, d’une vague de privatisations ainsi que de licenciements massifs dans le secteur public. Son élection, en 1999, avait été précédée d’un voyage de campagne aux Etats-Unis mené à bord d’un jet gracieusement fourni par Chevron.
Pour le grand plaisir de ses interlocuteurs, M. Obasanjo ne craint pas de lier affaires et religion. Dans son discours de remerciement, au Waldorf-Astoria, il prit soin de rappeler que c’était « Dieu qui avait mis le pétrole dans certaines régions afin que sa prospection assure leur développement ». Cette soirée fut aussi une sorte d’apothéose pour son organisateur, M. Andrew Young, figure emblématique du mouvement pour les droits civiques, et cofondateur de la société GoodWorks International (GWI), dont le siège se trouve à Atlanta. GWI est un cabinet de conseil et de lobbying qui, nous précise Laolu Akande, correspondant aux Etats-Unis du quotidien nigérian The Guardian, « a tiré sa fortune de ses relations avec Obasanjo ». Il ferait 40 % de son chiffre d’affaires avec le Nigeria. « Des millions de dollars », estime le New York Times (3), sans plus de précision.
Il est vrai que le réseau transnational de GoodWorks facilite l’opacité de ses revenus. Le cabinet effectue des missions de « polissage d’image » pour le Nigeria, l’Angola, la Côte d’Ivoire, le Bénin, ou plus récemment pour le Rwanda et la Tanzanie, qui lui ramènent au minimum 220 000 euros par an et par client. Il travaille aussi pour plusieurs grandes sociétés américaines telles que Chevron-Texaco, mais aussi General Electric, Motorola, Monsanto ou Coca-Cola, qui cherchent à pénétrer les marchés africains (ou à y confirmer leur pénétration). Avec, à la clef, 1,5 % du montant des contrats remportés par les entreprises. Ce puissant réseau relationnel de chefs d’Etats africains et d’hommes d’affaires américains a été tissé au cours de la longue et contrastée carrière de M. Young.
Membre du conseil d’administration de plusieurs des cinq cents premières entreprises des Etats-Unis, « apôtre du capitalisme », selon le magazine Forbes, l’ancien maire d’Atlanta est entré dans la vie publique auprès de Martin Luther King lors de la lutte pour les droits civiques. Il a ensuite adhéré au Parti démocrate et fut élu au Congrès avant de devenir le premier ambassadeur afro-américain aux Nations unies sous l’administration de M. James Carter. Toutefois, c’est son élection – puis sa réélection – en tant que maire d’Atlanta (de 1982 à 1989), alors engagée dans la course à l’organisation des Jeux olympiques de 1996, qui constitua un tournant dans sa vie. Il fit de la cité l’une des villes phares de l’entrepreneuriat américain. M. Young aime à rappeler que cette évolution fait d’Atlanta un « modèle pour l’Afrique de demain ».
Dans les années 1980, le démocrate Young n’hésitait pas à fustiger les « millionnaires noirs sans cœur, qui iront probablement en enfer, et qui feraient mieux de voter républicain (4) ». Depuis, il participe aux comités multiples qui orientent la politique américaine et est devenu l’un des « sorciers noirs » de la diplomatie d’influence de l’administration Bush : « Plus j’en lisais sur Paul Wolfowitz [ex-président de la Banque mondiale], plus je comprenais ce que nous avions en commun, déclarait-il ainsi en décembre dernier. Nous avons eu le même mentor, George Schultz (5). Nous sommes arrivés par des chemins complètement opposés, mais nous nous retrouvons avec un même objectif, celui de répandre la paix (6). »
Les critiques pleuvent de plus en plus sur M. Young et ses affaires africaines. Si les soupçons et les reproches, particulièrement acerbes, ont le Nigeria pour toile de fond, ils dépassent largement les relations d’« amitié » tissées avec M. Obasanjo depuis la fin des années 1970. Officiellement, en effet, GoodWorks est censée pratiquer chez « Mama Afrika » une philosophie entrepreneuriale résumée par son slogan : « Doing well by doing good [« Faire bien en faisant le bien »] (7). » Or elle semble plutôt exprimer le double visage des milieux économiques noirs américains qui interviennent en Afrique subsaharienne depuis la fin des années 1990 : un business qui se développe à la faveur des accords de libre-échange économique passés entre Washington et les « bons élèves » du continent. Comme le note Antoine Glaser, directeur de la rédaction de La Lettre du continent, GoodWorks serait ainsi le chef de file d’une génération d’intermédiaires afro-américains en train de « s’imposer comme les nouveaux leviers du pouvoir des Etats-Unis en Afrique ». « S’ils sont les premiers à prôner en public des principes éthiques tels que la transparence dans la conduite des affaires avec l’Afrique, résume-t-il, ils sont aussi directement à la manœuvre avec ceux qui sont les plus critiqués, tel le président angolais Eduardo dos Santos (8). Et c’est une tendance qui va se renforcer alors que la rivalité économique avec la Chine, qui utilise régulièrement son statut de puissance affranchie du colonialisme, s’exacerbe sur le continent. »
Des prétentions éthiques
Ces hommes, qui n’hésitent pas à brandir auprès des médias et de l’opinion subsaharienne tant leurs états de service d’anciens combattants des droits civiques que leurs racines africaines, seraient en train de servir de véritable « cheval de Troie » à Washington dans sa conquête des dividendes de l’aide financière. « En fait, après la “Françafrique”, précise Glaser, il faudrait tout simplement inventer un nouveau néologisme pour parler de la mainmise de ces consultants afro-américains sur les affaires du continent, autant comme sous-traitants des grandes entreprises américaines que du département d’Etat. » Il suffit de regarder où GoodWorks ouvre ses bureaux : exclusivement dans des pays bénéficiant de préférences douanières accordées par les Etats-Unis. « On pourrait presque parler désormais d’“afro-américafrique”... »
Avant que la révélation de la nature des relations entre GWI et le Nigeria ne déclenche l’ire de nombreux éditorialistes américains, cette société était déjà dans la ligne de mire des altermondialistes et des combattants américains pour les droits sociaux. En effet, en 1999, M. Young a accepté de conduire une mission pour Nike dans ses usines du Sud-Est asiatique. De son « étude », il a conclu qu’« il n’existe aucune preuve de mauvais traitements infligés aux salariés ». Quelques semaines plus tard, un rapport indépendant dénonçait les conditions de travail « dangereuses, inhumaines et épouvantables » pratiquées par l’équipementier sportif dans ces pays.
En février 2006, nouveau scandale, cette fois-ci lié à Wal-Mart (9). M. Young est engagé par le numéro un de la grande distribution pour diriger un groupe de pression qui lui est lié, le Working Families for Wal-Mart. Même objectif : redorer l’image socialement écornée du géant, particulièrement auprès de la communauté noire et des « affamés », « à qui Wal-Mart donne de bons produits frais ». M. Young sera obligé de démissionner de ce poste après avoir été taxé de racisme pour ses réflexions sur les petits commerçants issus des minorités ethniques : « Ce sont ces gens qui nous escroquent en nous vendant du pain rassis, de la mauvaise viande et des légumes pas frais. Je pense qu’ils ont assez arnaqué nos communautés. D’abord, il y a eu les Juifs, ensuite les Coréens, et maintenant les Arabes. Peu de Noirs possèdent de telles boutiques. » Commentaire du porte-parole de Wal-Mart : « Nous sommes d’autant plus consternés par ces propos qu’ils viennent de quelqu’un qui a beaucoup travaillé, et si longtemps, pour l’égalité des droits dans ce pays. »
En 2007, sur fond d’élection nigériane, et alors que GoodWorks vient de fêter ses dix ans, plusieurs sites afro-américains intensifient leurs attaques. L’intellectuel de Chicago Prexy Nesbitt, lui-même ancien militant de la lutte pour les droits civiques et l’un des architectes de la campagne menée dans les années 1970 aux Etats-Unis contre l’apartheid sud-africain, remarque : « Une certaine catégorie de Noirs américains n’a aucun sens de ses responsabilités vis-à-vis du continent africain. Ils n’éprouvent aucune honte, sont sans attaches, et sont incapables d’agir. On voit de plus en plus émerger des Noirs américains au service du système. Ce sont en quelque sorte les gendarmes de ce système qui vise à recoloniser l’Afrique, à la fois militairement et commercialement. Condoleezza Rice [secrétaire d’Etat] en est un bon exemple. Il en est de même de la nouvelle secrétaire d’Etat adjointe aux affaires africaines [Mme Jendayi Frazer] (10). »
La manière dont GoodWorks s’est introduite dans les cercles décisionnaires africains par le biais de M. Obasanjo – un homme, se félicite M. Young, « qui, depuis les années 1960, a participé à tout ce qui est arrivé de bon à l’Afrique » – constitue un autre sujet de polémique. A l’occasion de l’anniversaire du cabinet de conseil, Ken Silverstein, journaliste et éditorialiste, l’un des meilleurs spécialistes du commerce entre les Etats-Unis et l’Afrique, s’en prend aux prétentions éthiques de GWI : « La maire d’Atlanta Shirley Franklin a récemment expliqué que GoodWorks prouvait qu’un capitalisme orienté vers la collectivité était possible. Si la collectivité à laquelle elle se réfère est celle des leaders africains corrompus, de leurs amis américains et des milieux d’affaires, elle a raison. Mais, si elle essayait de nous dire que GoodWorks est à la hauteur de son nom quand il s’agit de lutter contre la pauvreté, elle ne pouvait pas se tromper davantage. »
Les instances dirigeantes de GWI comptent, entre autres, deux anciens ambassadeurs afro-américains au Nigeria : MM. Howard Jeter et Walter Carrington. La responsable du bureau d’Abuja, Mme Sharon Ikeazor, est l’ancienne avocate du bureau nigérian de la Royal Dutch Shell. Tout aussi ambivalent est le profil de M. Carlton A. Masters, actuel numéro un de GoodWorks, également cofondateur de la société. Jamaïquain naturalisé américain, il a épousé en juin 2005 la fille de Sullivan lors de noces organisées à Abuja en présence du président nigérian. Un privilège exceptionnel, note-t-on sur place. Il a même créé une entreprise en Floride, la Sunscope Investments, avec des membres de l’entourage de M. Obasanjo.
Un autre pas a été franchi à l’automne 2006 lorsque M. Masters fut nommé envoyé spécial de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao, dont le siège est à Abuja) pour les relations avec la diaspora africaine. Les Nigérians d’Amérique s’étaient déjà étonnés que leur pays, qui bénéficie d’un personnel diplomatique très compétent aux Etats-Unis, puisse engager – moyennant des rétributions annuelles de 500 000 dollars – une société de lobbying telle que Goodworks. Ils furent les premiers à réagir à cette désignation. « Nommer un Américain à ce poste signifie-t-il qu’aucun Africain ne pouvait exercer cette fonction ? », s’insurge ainsi M. Steve Nwabuzor, président de la Nigerian Leadership Foundation (11). L’intéressé se défend : « J’ai bien l’intention d’utiliser cette nomination non seulement pour attirer l’attention globale sur les besoins de l’Afrique, mais aussi pour resserrer les relations entre les Etats-Unis et les quinze nations membres de la Cedeao. »
GoodWorks attribue les critiques qui s’abattent des deux côtés de l’Atlantique au vice-président nigérian – et candidat battu à la présidentielle d’avril 2007 –, M. Atiku Abubakar, qui utiliserait et répandrait ces calomnies dans la diaspora à des fins personnelles. La fortune de M. Abubakar ne serait pas, elle non plus, sans zones d’ombre. Pendant des mois, sous couvert de lutte contre la corruption, une véritable guerre des communiqués et des révélations a été menée entre les médias soutenant le « poulain » de M. Obasanjo à la présidentielle, M. Umaru Yar’Adua, et ceux roulant pour son vice-président, accusé de malversations financières.
La direction de GWI, qui n’a pas voulu répondre à nos questions, semble embarrassée par les accusations portées sur ses affaires panafricaines. Les mises en cause sont, en effet, de plus en plus directes. Avocat nigérian et président du barreau ouest-africain, M. Femi Falana estime ainsi crûment qu’« Andrew Young ne s’intéresse pas aux problèmes du Nigeria. Il y est juste venu pour faire du profit (12) ».
L’ancien maire d’Atlanta est l’un des associés d’une compagnie pétrolière nigériane, la Sun Trust Oil, détentrice depuis 2002 de l’une des licences d’exploitation les plus prometteuses du pays. Autre dirigeant de GoodWorks, M. Jeter est, quant à lui, entré au conseil d’administration de la société Environmental Remediation Holding Corporation (ERHC), particulièrement critiquée pour la manière dont elle a obtenu plusieurs permis de prospection dans la zone de développement conjoint créée entre le Nigeria et la République démocratique de São-Tomé-et-Príncipe (13).
Certes, il n’y a rien d’illégal à ce que des lobbyistes américains représentent tout à la fois un pays et des entreprises qui cherchent à s’y implanter. De même, ils peuvent faire des affaires personnelles avec un pays sous contrat avec GoodWorks. Mais ces liaisons, souvent opaques et propices à des irrégularités, favorisent le pillage de ressources dont les peuples africains auraient tant besoin.
En Jamaïque, un récent scandale met en lumière la nature des activités de GoodWorks. L’avocat et député travailliste jamaïquain Clive Mullings (opposition), chargé du dossier énergie et télécommunications, a décidé de « lever le voile » sur ce qu’il qualifie d’affaire internationale de « rétrocommission entre la société Trafigura, GoodWorks et les dirigeants nigérians et jamaïquains ». Une « fraude internationale », nous explique M. Mullings, sur fond d’accords bilatéraux signés entre les deux entreprises publiques pétrolières du Nigeria et de la Jamaïque durant les années 1990 (14). L’implication de GoodWorks dans cette histoire complexe remonterait à l’an 2000, soit un an après l’arrivée au pouvoir de M. Obasanjo. « A cette époque, il a été demandé à Carl Masters, dirigeant de GoodWorks, par le gouvernement conservateur jamaïquain alors en place, s’il pouvait assister la PCJ [Petroleum Company of Jamaica, Compagnie pétrolière de Jamaïque] dans l’obtention du pétrole de la Nigeria National Petroleum Corporation [NNPC]. C’est étrange quand on sait que, depuis 1978, la PCJ n’a jamais eu besoin d’une telle aide. » C’est à ce moment qu’intervient Trafigura, compagnie de courtage pétrolier et d’affrètement maritime, chargée d’acheter à prix bradé et de transporter ce pétrole. Impliquée dans une affaire semblable en Afrique du Sud, Trafigura percevait des rétrocommissions pour son intervention, sous forme de pourcentage sur les barils transportés, tandis que GoodWorks percevait aussi des honoraires : 15 % des recettes nettes de la PCJ (15).
Violences et irrégularités
L’« affaire Trafigura », comme on l’appelle à présent, a éclaté quand on a découvert que 460 000 euros avaient été virés, depuis Amsterdam, sur le compte d’un ministre jamaïquain, M. Colin Campbell. Des représentants de Trafigura (dont son président) ont rencontré en privé la première ministre Portia Simpson-Miller un mois avant que ce versement ne soit effectué. « Si le gouvernement qualifie ce transfert de fonds de “don”, Trafigura le qualifie de “transaction commerciale” dans le cadre de la renégociation de son contrat arrivé à terme. » Les autorités néerlandaises ont lancé une enquête. L’affaire a conduit à la démission de M. Campbell, alors ministre de l’information. M. Percival James Patterson, ancien premier ministre de la Jamaïque (1992-2006), qui était à l’origine de l’accord, a rejoint... la direction de GoodWorks.
Lors du dernier sommet organisé par la fondation Sullivan, tenu pour la deuxième fois consécutive à Abuja, le 20 juillet 2006, M. Young n’a pas hésité à inviter le président américain George W. Bush à participer au prochain rendez-vous, qui devrait avoir lieu en 2008 en Tanzanie. Par ailleurs, GWI a été chargée par le gouvernement tanzanien, pour 375 000 dollars, de mettre sur pied, aux Etats-Unis, des rencontres destinées à « faire pièce aux informations négatives publiées sur la Tanzanie dans la presse américaine ». Hasard : le cabinet de conseil travaille aussi pour la très controversée société minière canadienne Barrick Gold (16), particulièrement implantée dans ce pays.
Entachées de violences et d’irrégularités, les élections générales nigérianes d’avril 2007 ont débouché sur ce que les observateurs craignaient : l’élection truquée – mais sans surprise – de M. Yar’Adua, plus que jamais considéré comme une « marionnette » du président sortant Obasanjo, et nouveau client de GWI. Le dîner de gala du Waldorf-Astoria, rappelle le journaliste Akande, avait d’ailleurs été pour M. Obasanjo et GoodWorks l’occasion « de commencer à travailler la candidature et l’image de M. Yar’Adua. Ils expliquèrent notamment que, bien que gouverneur sortant d’un des Etats nigérians ayant institué la charia, celui de Katsina, M. Yar’Adua y avait respecté les droits de l’homme et empêché le pire : la montée de l’islamisme radical »...
Pendant ce temps, en Jamaïque, les yeux rivés sur deux continents, l’Amérique et l’Afrique, M. Mullings poursuit son enquête sur GoodWorks. Objectif : « Relier les pointillés et faire éclater au grand jour cette fraude internationale. »
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(1) Surnom donné à la démocratie nigériane à partir du mot « démocratie » et du mot anglais crazy (« fou »).
(2) M. Umaru Yar’Adua, candidat du People’s democratic Party (PDP), et ancien gouverneur de l’Etat musulman de Katsina (Nord), a été élu avec 24 638 063 voix, devançant le général Muhammadu Buhari, candidat du All Nigeria People’s Party (ANPP, opposition), qui a recueilli 6 605 299 voix. Le vice-président sortant, M. Atiku Abubakar, arrive en troisième position avec 2 637 848 voix.
(3) Cf. Barry Meier, « For US-Nigeria go-between, ties yield profits and criticism », The New York Times, 18 avril 2007.
(4) « Young assails Blacks who favor president », The New York Times, 27 octobre 1984.
(5) Ex-secrétaire d’Etat, partisan de la guerre en Irak, et administrateur de Bechtel, groupe de travaux publics retenu pour la reconstruction en Irak.
(6) The Washington Note (blog), « What’s up with Andrew Young’s groveling for Wolfowitz ? », 30 avril 2007.
(7) www.goodworksintl.com
(8) Président de l’Angola, M. José Eduardo dos Santos est fréquemment associé à la corruption et au détournement des revenus du pétrole de son pays.
(9) Lire « Petites mains du Sud pour firme du Nord » ; et Serge Halimi, « Wal-Mart à l’assaut du monde », Le Monde diplomatique, janvier 2006.
(10) Cité par Bruce Dixon, responsable éditorial du Black Agenda Report (site), « Africa, where the next US oil wars will be », 28 février 2007.
(11) Cf. « Carl Masters named Ecowas envoy », Nigeriavillagesquare.com.
(12) The New York Times, 27 octobre 2004, op. cit.
(13) Lire « Fièvre pétrolière à São-Tomé-et-Príncipe », Le Monde diplomatique, octobre 2006.
(14) « Lifting the veil » (PDF).
(15) Basée aux Pays-Bas, la société Trafigura Beheer BV est une compagnie de courtage pétrolier (trading) et d’affrètement maritime spécialisée dans le transport des matières premières. Elle est citée dans plusieurs scandales, dont l’affrètement du Probo-Koala, qui transporta au cours de l’été 2006 jusqu’en Côte d’Ivoire des déchets qui seront déversés dans diverses décharges autour d’Abidjan. Leurs émanations intoxiquèrent vingt-trois mille personnes, firent sept morts et trente-cinq blessés graves.
(16) Numéro un mondial de l’extraction d’or, Barrick Gold est l’objet de nombreuses accusations en rapport avec la conduite de ses activités, particulièrement sur le continent africain (République démocratique du Congo, Tanzanie...).


http://www.monde-diplomatique.fr/2007/06/SERVANT/14809 - JUIN 2007 

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