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De Tintin au Congo à Tintin au tribunal, accusé de racisme par M. Mbutu Monondo Bienvenu

par Akodien 9 Août 2007, 10:21 Lu pour vous

Tintin.jpg«Tintin en prison», «Tintin au pays du racisme», «Tintin et le casque colonial» pourraient bien être des titres accrocheurs d’une prochaine BD. Pourtant il s’agit là d’une affaire autrement plus sérieuse. L’étudiant africain de RDC, Mbutu Monondo Bienvenu a déposé une plainte fin juillet 2007 auprès du juge d’instruction de Bruxelles au sujet de l’album de BD «Tintin au Congo» pour son contenu raciste. Une évidence factuelle.

Le plaignant qui voit dans cette œuvre une apologie du racisme, du travail forcé et une infantilisation des Noirs, exige que l’album soit retiré de la vente ainsi que le paiement d’un euro symbolique.
Il faut dire que Tintin, celui qui était au Congo au moins, a été à plusieurs reprises taxé de racisme, Milou y compris, canin traitant de paresseux des Congolais contraints aux travaux forcés. En juillet 2007 la commission britannique pour l’égalité des races (CRE) avait jugé la bande dessinée raciste et demandé qu’elle soit retirée des librairies. Conséquence de quoi le groupe américain Borders avait décide de ne plus vendre cet album au rayon «enfant» mais «adultes» en Angleterre et aux Etats-Unis … les adultes ayant eux droit au racisme, bien entendu.

 

Beaucoup d’observateurs avaient déjà remarqué le caractère biaisé de cette aventure de Tintin en son temps. Hergé le père de Tintin avait admis les critiques, expliquant qu’il baignait dans les années 1930, années de la sortie de la première version dans un milieu bourgeois nourri aux préjugés raciaux. D’ailleurs, plutôt que l’enlever de la circulation, économique oblige, il avait fait une deuxième version en 1946 dans laquelle par exemple Tintin n’apprenait plus aux Congolais que leur patrie était … la Belgique, se contentant de leur donner une leçon de mathématiques.
La recevabilité de la plainte n’est pas encore établie, elle s’appuie sur la loi de belge de 1981 réprimant le racisme, ce à quoi la société Moulinsart qui gère les droits de l’œuvre de Hergé rétorque qu’il faut considérer «Tintin au Congo» «dans son contexte» colonial.

Le plus important est évidemment le précédent d’une telle démarche à saluer venant d’un étudiant africain qui ne s’est pas terré dans les peurs quotidiennes liées à la précarité de conditions des étudiants africains et qui s’est pleinement considéré comme sujet de droit.

En effet, on n’imagine à peine l’impact de telles publications à grands succès de 7 à 77 ans dans la socialisation d’une image dépréciative de l’Autre, cannibale, paresseux, bête et méchant, parlant un Français que même les animaux entre eux dominent. Il s’agissait, avec les zoos humains, des rares éléments presque visibles de contacts avec les colonisés, ce qui a formé durablement des consciences racistes y compris à leur insu.

Rien d’étonnant à ce que l’on retrouve chez les plus hautes autorités des pays colonisateurs, un demi siècle plus tard une conception de l’altérité, du négro-africain proche des aventures du célèbre journaliste égaré dans une colonie 80 fois plus grande que sa modeste mais ambitieuse Belgique natale.

 

Une initiative qui on peut l’espérer fera école et décomplexera tous ceux qui pour diverses raisons hésitent à franchir le pas de l’action en justice, même si celle si ne donne pas toujours -c’est une litote- les résultats escomptés. Il s’agit aussi d’un processus d’apprentissage, d’autant plus que de l’autre côté les diffuseurs de contenus, se sachant sous la menace crédible d’actions antiracistes pénalisantes y regarderont à plus d’une fois avant d’envoyer Tintin au Congo avec armes, bagages et préjugés raciaux.

 

 

 

Sources : Afrikara

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