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De la mourante "Françafrique" à la dynamique "Chinafrique"

par Bacary Goudiaby 22 Juillet 2012, 05:35 Analyses & opinions

Afrique-Chine.gifLe 19 juillet, lors la cinquième conférence ministérielle Chine-Afrique, Pékin a annoncé qu'il doublerait ses crédits alloués à l'Afrique se positionnant ainsi comme la seule puissance économique dominante en Afrique, qui favorise la croissance des pays du continent.

Les impacts sont indéniables, ils ont même été reconnus par le FMI, pour qui la présence chinoise a non seulement contribué à la croissance des PIB nationaux, mais a aussi été un facteur de résilience pour nombre d'Etats africains durant la crise financière. Les investissements chinois en Afrique sont assez diversifiés, ils s'orientent majoritairement vers le secteur manufacturier, et se développent dans le domaine bancaire.

La Chine a été un moteur pour la construction d'infrastructures. Elle fait également renaître des projets jugés insuffisamment rentables par les entreprises occidentales, comme des projets pétroliers au Niger. Mais, certaines industries africaines naissantes ont été touchées par la concurrence chinoise, et la population locale ne bénéficie pas toujours de l'effet d'aubaine de ces nouveaux projets, en raison d'un taux insuffisant de "local content", c'est-à-dire d'embauche et de sous-traitance locale.

 

Pour l'heure, l'Inde est le seul véritable Etat capable de concurrencer la Chine pour plusieurs raisons : elle dépend plus que la Chine de ses importations de pétrole et de minerai, sa croissance démographique préfigure un accroissement de ses besoins, les entreprises indiennes (Tata, Arcelor-Mittal...) sont de dimension mondiale. L'Inde, de part sa valeur ajoutée dans le domaine des Nouvelles technologies de l'information et de la communication, constitue un attrait certain pour nombre de pays africains. Reste à savoir si le pays honorera ses promesses en matière de transfert de technologies.

 

La montée en puissance de la «Chinafrique» signifie t-elle la fin des relations privilégiées entre la France et de nombreux États de ce continent?

Malgré des liens forts avec un certain nombre d’États africains, la France a eu tendance, sur le long terme, à se retirer de ce continent. Le poids des investissements, la présence militaire, tous les indicateurs vont dans ce sens. La France a diversifié ses interventions dans le monde, même si elle a toujours des relations privilégiées, en particulier avec les pays francophones.

A l'inverse de cette dynamique française, des pays émergents, notamment la Chine, mais aussi l'Inde ou le Brésil, arrivent massivement sur le continent africain. On peut voir les Chinois comme des concurrents sérieux. La diversification des partenaires pour les États africains change la donne. L'intérêt des pays émergents pour les ressources naturelles dont dispose le continent africain favorise forcément la croissance de ce dernier.

 

Aujourd'hui, l'aide française s'est largement multilatéralisée. Elle dépend de nombreuses contraintes européennes. Paris s'appuie de manière croissante sur des ensembles régionaux plutôt que sur des États. Elle travaille beaucoup avec des ONG. La politique d'aide chinoise ne connaît pas tous ces outils et repose uniquement sur des relations d’État à État.

 

Pour cela, les dirigeants chinois mettent en avant aussi bien les colossaux investissements que l’approche qui, dit-on, "moins arrogante et empreinte de plus d’humilité", se soucierait davantage du respect de la souveraineté des Etats africains. Pour autant, du point de vue africain, certains observateurs conseillent à la fois la prudence et la vigilance, afin d’éviter une sordide reprise des schémas qui ont déjà fait leurs preuves quant aux conséquences néfastes sur le développement socio-économique du continent africain.

 

Depuis 2009, la Chine, désormais seconde économie mondiale, figure au premier rang des partenaires commerciaux du continent africain. Supplantant ainsi les vieux partenaires issus des rapports coloniaux. Une prouesse qui a tout de même son prix. Aussi, en fin 2011, les échanges commerciaux entre le géant chinois et le continent africain se chiffraient à 166, 3 milliards de dollars US, soit une hausse de 83 % par rapport à ce qu’ils étaient en 2009.

 

L’aide chinoise à l’Afrique a augmenté de 60 % depuis 2009. Ces 60 %, c’est également le pourcentage de progression des investissements directs chinois en Afrique depuis 2009, soit 14, 7 milliards de dollars US en fin 2011. Or, la Chine n’entend pas se limiter là. Loin s’en faut.

 

Moins affectée par la crise mondiale, l’économie chinoise ayant enregistré une forte croissance ces dernières années, se dit prête à épauler le continent berceau de l’humanité. C’est ainsi que le président chinois Hu Jintao, en personne a annoncé le doublement des investissements chinois en Afrique pour les trois prochaines années. De 10 milliards actuellement, ils pourront ainsi passer à 20 milliards à l’horizon 2015.

 

Au-delà de ces chiffres somme toute bruts, la présence chinoise sur le continent africain se remarque aussi avec les milliers de kilomètres de routes, les nombreux établissements immobiliers, les gigantesques chantiers énergétiques et agricoles, les grands projets de télécommunications, etc. Il s’agit donc d’un partenariat dont l’impact est visible. Par ailleurs, les leaders africains apprécient particulièrement le fait que les amis chinois rechignent à s’ingérer dans les affaires intérieures de leurs pays. De même, dans les milieux intellectuels panafricanistes, on loue le fait que la Chine, contrairement aux anciennes puissances coloniales, laisse à l’Afrique le soin de choisir sa voie de développement, sans aucune espèce d’imposition. Enfin, la Chine à la différence des institutions de Breton Woods, a quelques égards pour les secteurs sociaux que sont la santé et l’éducation.

 

Ainsi qu’on le voit, la Chine est un nouveau partenaire qui offre une possibilité de diversification au continent africain. Pour autant, il s’agit d’un nouveau partenaire vis-à-vis duquel il faut garder toute la lucidité et se rappeler une règle de base des relations internationales : Les Etats n’ont point d’amis, rien que des intérêts. Pour être "gagnant-gagnant", il faut être aussi vigilant! Il faudrait surtout pas une "Chinafrique" à la de la mourante "Françafrique"!

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commentaires
B
There are many mysteries lying around the creation of this world. However, I would like to believe that it was created by a supreme power. The different continents were formed due to the shift in lands and you can read about many discussions that explains it.
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