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La mère de l'humanité saigne

par Akodien 9 Juin 2007, 00:10 Nouvelles du jour

Lion-of-Africa.jpgUne pénurie de personnel soignant est en train de paralyser le système de santé du Lesotho, du Malawi, du Mozambique et de l'Afrique du Sud, et menace la vie de millions de personnes, particulièrement dans les zones rurales, avertit Médecins sans frontières, une organisation non gouvernementale mondiale spécialisée dans les services médicaux.

Un nouveau rapport de l'organisation, lancé le 24 mai à Johannesburg, la capitale économique sud-africaine, montre que seule l'Afrique du Sud a atteint l'objectif de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) pour une mise à disposition adéquate du personnel soignant : 74,3 médecins, 393 infirmiers et 468 aide-soignants pour 100.000 habitants.

L'exigence minimum de l'OMS est de 20 médecins, 100 infirmiers et 228 aide-soignants pour 100.000 habitants. Même si l'Afrique du Sud a atteint l'objectif de l'OMS, elle continue de souffrir d'un manque du personnel chargé de gérer et de fournir des services essentiels comme les médicaments anti-rétroviraux (ARV) pour prolonger la vie des personnes vivant avec le VIH/SIDA.

L'étude portant sur "La pénurie du personnel soignant limite l'accès au traitement du VIH/SIDA en Afrique du Sud", a révélé que le Lesotho, le Mozambique et le Malawi sont dans des situations désespérées. "Au Lesotho, il n'y a juste que 89 médecins, dont 80 pour cent sont des étrangers", a déclaré, aux journalistes à Johannesburg, Pheelo Lethola, médecin de terrain de MSF dans ce petit royaume montagneux de Lesotho.

Cette pénurie affecte également la catégorie des infirmiers. "Il n'y a que 1.123 infirmiers pour une population d'environ 1,8 million habitants. Seuls six des 171 centres de santé du pays ont le personnel minimum requis, a indiqué Lethola.

La situation du Malawi est également critique. "Le Malawi compte seulement 10 pour cent des docteurs en médecine et 40 pour cent des infirmiers recommandés par l'OMS. Près de la moitié des 165 médecins en fonction au Malawi travaillent dans des hôpitaux proches du centre, créant ainsi des pénuries chroniques dans des zones rurales. Le taux de postes d'infirmiers à pourvoir dans les zones rurales est de 60 pour cent", a indiqué Veronica Chikafa, une infirmière malawite.

Cette situation met à rude épreuve le personnel soignant au Malawi. "Par exemple, dans une salle, un infirmier s'occupe de 100 patients. Un assistant médical consulte 100 patients par jour. Parfois, un patient doit attendre toute une journée avant de voir un médecin. Parfois, le patient est obligé de retourner à l'hôpital le lendemain s'il ou elle n'a pas pu voir le médecin la veille," a-t-elle ajouté.

Le Mozambique vit la même situation fâcheuse, souligne MSF, étant donné qu'il y a seulement 2,6 médecins, 20 infirmiers et 34 aide-soignants pour 100.000 habitants.

"Près de la moitié des 608 médecins en activité au Mozambique travaillent dans la capitale Maputo, laissant les centres de santé dans les zones rurales sans médecins", a déclaré David Nhantumbo, technicien médical de MSF au Mozambique.

D'autres sous-régions africaines sont confrontées au même problème. Lors de la commémoration la Journée mondiale de la santé l'année dernière, l'OMS a singularisé l'Afrique sub-saharienne comme ayant les plus grands défis à relever.

"Tandis qu'elle compte 11 pour cent de la population mondiale et 24 pour cent du fardeau mondial de maladies, elle ne dispose que de trois pour cent du personnel soignant mondial", a indiqué l'OMS.

"En moyenne, un sur quatre médecins et un sur 20 infirmiers formés en Afrique travaillent dans les pays de l'OCDEC (Organisation pour la coopération et le développement économiques). Certains pays sont plus affectés que d'autres. Par exemple, 29 pour cent des médecins ghanéens exercent à l'étranger, comme le font 34 pour cent des infirmiers zimbabwéens", a souligné l'OMS.

L'OMS a indiqué que 57 pays, la plupart de l'Afrique et de l'Asie, traversent une crise grave du personnel soignant. "On a besoin d'au moins 2,4 millions aide-soignants et de 1,9 million membres du personnel d'appui, soit un total de 4,25 millions membres du personnel soignant, pour combler le déficit. Sans une action prompte, la pénurie s'aggravera", a-t-elle ajouté.

En Afrique australe, la plupart des travailleurs du secteur de la santé émigrent vers le Canada, la Nouvelle Zélande, le Royaume-Uni et les Etats-Unis où ils gagnent plus qu'ils n'en trouvent chez eux.

Par exemple, les médecins et les infirmiers originaires de Lesotho sont en train de partir pour l'Afrique du Sud et le Royaume-Uni à la recherche des salaires et des conditions de travail meilleurs, a déclaré Lethola. "Il incombe au gouvernement d'augmenter les salaires et d'améliorer les conditions de travail. Car chaque jour que rien n'est fait dans ce sens, plus de gens continueront de mourir", a-t-elle dit.

Pour arrêter le débauchage des professionnels de santé des pays pauvres, le gouvernement sud-africain a annoncé des mesures l'année dernière en vue de réduire le recrutement des médecins étrangers. Mais cette mesure a été critiquée par des vétérans tels que Mignonne Breier, un spécialiste et directrice de recherche au Conseil de la recherche en sciences humaines (HSRC), un organisme scientifique de droit public.

"Les politiques consistant à réduire le nombre des médecins étrangers sont particulièrement difficiles à mettre en oeuvre quand on sait que l'Afrique du Sud compte moins de sept médecins pour 10.000 habitants tandis que le Royaume-Uni en a autour de 21, les Etats-Unis autour de 24 et beaucoup de pays européens, plus de 30", a écrit Breier
"Nos propres médecins émigrent en nombres importants (estimés à 150 par an) et, parmi ceux qui restent au pays, plus de 60 pour cent travaillent dans le secteur privé où ils servent moins de 20 pour cent de la population", a-t-elle souligné.

"On affirme que l'Afrique du Sud peut combler ce manque en augmentant rapidement le nombre de ceux qui sortent des écoles de médecine. L'objectif est de doubler le nombre de diplômés de 1.200 à 2.400 par an d'ici à 2014", a-t-elle ajouté.

MSF-Afrique du Sud croit que le problème de la fuite des cerveaux pourrait se régler. Des mesures devraient être prises, telles que la création des possibilités d'avancement aux infirmiers dans leur carrière à travers la promotion et la formation.
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